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Crédit immobilier – Inclusion du coût de l’assurance dans le TEG – Conditions

Dans un arrêt du 26 Février 2020, la première chambre civile de la Cour de cassation a précisé que le coût d’une assurance invalidité décès destinées à garantir le paiement d’un prêt immobilier, n’a pas à être inclus dans le taux effectif global (TEG), lorsque le contrat de prêt laisse à l’emprunteur la faculté de s’assurer et de choisir un contrat d’assurance.

Le coût de cette assurance ne doit figurer dans le taux effectif global du prêt que si le prêteur impose à l’emprunteur de souscrire un contrat d’assurance invalidité décès.

Source

Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 26 février 2020, 19-10.050, Inédit

Références

Cour de cassation 
chambre civile 1 
Audience publique du mercredi 26 février 2020 
N° de pourvoi: 19-10050 
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Célice, Texidor, Périer, SCP Foussard et Froger, avocat(s) 


Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant : 

CIV. 1

FB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 26 février 2020

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 159 F-D

Pourvoi n° S 19-10.050

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 26 FÉVRIER 2020

La société *****, société civile immobilière, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° S 19-10.050 contre l’arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d’appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l’opposant à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel d’Aquitaine, dont le siège est […] , ayant un établissement […] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Betbe, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel d’Aquitaine, après débats en l’audience publique du 21 janvier 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 6 septembre 2018), par acte sous seing privé du 20 novembre 2010, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel d’Aquitaine (la banque), a consenti à la société civile immobilière Betbe (la SCI), un prêt d’un montant de 510 000 euros, au taux effectif global (TEG) de 3,77 %, destiné à financer l’achat d’un bien immobilier et la réalisation de travaux.

2. Soutenant que des erreurs affectaient le TEG mentionné dans l’acte de prêt, la SCI a assigné la banque en nullité du TEG, en déchéance du droit aux intérêts conventionnels et en restitution des intérêts trop perçus.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La SCI fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes, alors « que les juges du fond ont estimé que la SCI a suffisamment démontré que la banque avait calculé et appliqué un taux d’intérêt calculé sur la base de « l’année lombarde » de trois cent soixante jours ; qu’en refusant néanmoins de substituer le taux d’intérêts légal au taux d’intérêts conventionnel, comme le demandait la SCI, au prétexte que l’erreur affectant le taux effectif global était inférieur à la décimale de l’ancien article R. 313-1 du code de la consommation, la cour d’appel a violé l’article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation en leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 et l’article R. 313-1 du même code en sa rédaction issue du décret n° 2002-327 du 10 juin 2002. »

Réponse de la Cour

4. L’arrêt énonce exactement qu’il n’y a pas lieu à annulation de la stipulation de l’intérêt conventionnel lorsque l’écart entre le TEG mentionné dans le contrat de crédit et le TEG réel est inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-327 du 10 juin 2002.

5. Ayant relevé que la banque avait appliqué un taux d’intérêt calculé sur la base d’une année de trois cent soixante jours, la cour d’appel a souverainement estimé qu’après prise en compte des frais de dossier et du coût de la caution, l’écart entre le TEG mentionné dans le contrat de prêt et le TEG réel s’établissait à 0,0355 %. Elle en a déduit à bon droit que les demandes de la SCI devaient être rejetées.

6. Le moyen n’est donc pas fondé.

Sur la seconde branche du moyen

Enoncé du moyen

7. La SCI fait le même grief à l’arrêt, alors « que, s’agissant de l’assurance contre les risques de décès et d’invalidité souscrite par les époux C…, l’arrêt attaqué a retenu que, selon les stipulations du contrat, au lieu de l’assurance collective souscrite par la banque l’emprunteur pouvait souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance au moins équivalente en termes de garanties à celle proposée par la banque ; qu’il en résulte que l’assurance contre les risques de décès et d’invalidité était obligatoire, les époux C… n’ayant d’autre choix que d’adhérer à l’assurance de groupe souscrite par la banque ou de souscrire une assurance équivalente ; qu’en qualifiant cette assurance de facultative pour en exclure le coût du calcul du taux effectif global, la cour d’appel a violé l’article L. 313-1 du code de la consommation en sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006. »

Réponse de la Cour

8. L’arrêt constate qu’aucune stipulation contractuelle ne confère un caractère obligatoire à l’assurance décès-invalidité, qu’au contraire, celle-ci est mentionnée en page 2 du contrat comme facultative, qu’il est en outre stipulé qu’au lieu de l’assurance collective souscrite par la banque, l’emprunteur peut, et non doit, souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance au moins équivalente en termes de garanties à celle proposée par le prêteur.

9. De ces constatations et énonciations, la cour d’appel a pu déduire que cette assurance ne constituait pas une condition d’octroi du prêt. Dès lors, c’est à bon droit qu’elle a énoncé que celle-ci ne devait pas être prise en compte dans le calcul du TEG.

10. Le moyen ne peut donc être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société SCI ***** aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six février deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Betbe.

L’arrêt attaqué encourt la censure ;

EN CE QU’il a débouté la SCI Betbe de toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QU’« au soutien de ses prétentions concernant le calcul des intérêts conventionnels sur la base de l’année lombarde de 360 jours, et les modalités du calcul du taux effectif global, la SCI produit deux pièces (numéro 3 et 12) portant l’en-tête de son propre conseil. Aucune disposition n’interdit à l’emprunteur de faire établir par son conseil un calcul financier du taux réel du prêt, nonobstant le caractère complexe des opérations effectuées sous forme d’analyse financière, ni de le soumettre à la libre discussion des parties dans le cadre d’un débat contradictoire, sauf ensuite à la juridiction à en tirer toute conséquence en rejetant la demande ou en ordonnant avant dire droit une mesure d’instruction si elle estime le calcul erroné ou insuffisant au regard des prescriptions légales et réglementaires. Il résulte de l’application combinée des articles 1907 du code civil et des articles L.313-1, L.313-2 et R.313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction en vigueur lors de la conclusion du prêt, que le taux de l’intérêt conventionnel mentionné par écrit dans l’acte de prêt consenti à un consommateur ou un non-professionnel doit, comme le taux effectif global-, sous peine-de-se-voir-substituer l’intérêt légal, être calculé sur la de l’année civile. Il n’est pas contestée que l’on doit retenir la qualité de non-professionnelle pour la SCI familiale dénommée SCI Betbe, constituée le 23 décembre 2009, ayant pour associés T… C…, son épouse née N… F…, Mme I… C… et M. X… C… et il est précisé en page 1 de l’acte du 20 novembre 2010 que le prêt est destiné à financer l’achat d’un immeuble ancien […] , à titre de résidence principale et usage locatif, avec réalisation de travaux. La SCI fonde son argumentation sur un calcul des intérêts intercalaires réglés à la banque avant déblocage complet du prêt immobilier et son début d’amortissement et prend à titre d’exemple les deux premières échéances réglées, soit 249,49 euros le 7 décembre 2010 et 1263,86 euros le 5 janvier 2011, ainsi que cela ressort des relevés bancaires versés au débat. Il est en effet stipulé en page 2 du contrat de prêt immobilier que «durant la période de différé d’amortissement, l’emprunteur s’engage à payer à terme échu et conformément aux conditions financières ci-avant les intérêts calculés à compter du jour de la première mise à disposition des fonds sur les sommes effectivement débloquées. En conséquence il n’y a pas d’amortissement du capital durant cette période.». Il ressort des relevés de comptes de dépôt versés aux débats par la SCI que la banque a débloqué les fractions de prêt suivantes : – 404580 euros le 29 novembre 2010, – 6000 euros le 10 décembre 2010, – 3474,85 euros le 4 janvier 2011. Il est constant que le capital restant dû s’élevait en conséquence à : -404580 euros le 7 décembre 2010, – 414054,85 euros le 5 janvier 2011. En retenant un taux d’intérêt calculé sur la base de l’année civile, soit 365 jours conformément à l’annexe c) de l’article R.313-1 du code de la consommation, la première échéance du 7 décembre 2010 aurait dû être de 404580 x 3,70% x 6/365 = 246,07 euros. Toujours selon la même méthode, la seconde échéance aurait dû être de : – pour la période du 7 au 10 décembre 2010 : 404580 x 3,70% x 4/365 = 164,05 euros, -pour la période du 10 décembre 2010 au 4 janvier 2011: 410580 x 3,70% x 25/365 = 1040,51 euros, – pour la période du 4 au 5 janvier 2011 : 414054,85 x 3,70% x 1/365 = 41,97 curas (et non 42,56 euros comme indiqué par erreur dans le calcul de la SCI). Soit au total la somme de 1246,53 euros. Il apparaît donc que la banque a calculé le taux des intérêts intercalaires sur la base d’une année lombarde de 360 jours, ainsi que cela ressort des calculs réalisés par la SCI qui ne sont pas utilement contestés : – première échéance d’intérêts intercalaires : 404580 x 3,70% x 6/360 = 249,491 euros arrondi à 249,49 euros, – seconde échéance: – pour la période du 7 au 10 décembre 2010 : 404580 x 3,70% x 4/360 = 166,3273 euros arrondis à 166,33 euros, – pour la période du 10 décembre 2010 au 4 janvier 2011 : 410580 x 3,70% x 25/360 = 1054,97 euros pour la période du 4 au 5 janvier 2011 : 414054,85 x 3,70% x 1/360 = 42,5556 euros arrondis à 42,56 euros. Soit un total de 166,33 + 1054,97 + 42,56 = 1263,86 euros. Pour contredire les arguments de la SCI, le Crédit agricole soutient que les échéances prélevées ont été calculées non pas sur la base de l’année lombarde, mais en fonction du mois normalisé comportant 30,41666 jours, comme prévu par l’annexe à l’article R.313-1 du code de la consommation. Mais le calcul ainsi proposé se fonde en réalité non pas sur la notion de mois normalisé mais celle de «jour normalisé» soit 6,083333 jours pour la première échéance soit 404580 x 3,70% x 6,083333/365 = 249,49 euros et de 4,055555 + 25,347222 + 1,013889 = 30,416666 jours pour la seconde échéance. Or, le recours à cette notion de « jour normalisé » n’est prévu ni par l’annexe de l’article R.313-1 précité, ni par la convention des parties et les intérêts intercalaires doivent être calculés en fonction uniquement du nombre exact de jours de mise à disposition du capital, entre le virement de la fraction de prêt au Crédit du compte bancaire et le prélèvement de l’échéance. La SCI a suffisamment démontré que la banque avait en réalité appliqué un taux d’intérêt calculé sur la base d’une année de 360 jours. Il convient toutefois de rappeler qu’il n’y a pas lieu à annulation de la stipulation d’intérêts ni à déchéance du droit aux intérêts conventionnels lorsque l’écart entre le TEG mentionné dans le contrat de crédit et le TEG réel est inférieur à la décimale prescrite par l’article R. 313-1 du code de la consommation. A ce titre, la somme payée par l’emprunteur au titre de la constitution d’un fonds de garantie créé par une société de caution mutuelle pour garantir la bonne exécution du prêt et dont le montant est déterminé lors de la conclusion du prêt est imposée comme une condition d’octroi de celui-ci, de sorte qu’elle doit être prise en compte pour le calcul du taux effectif global. En l’espèce, en application de l’article L.313-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable au litige, la banque aurait dû inclure dans le calcul du TEG figurant dans son offre de prêt du 20 novembre 2010 la somme de 4580 euros correspondant au coût du cautionnement du Crédit Logement dont elle avait fait une condition de l’octroi du prêt, ainsi que cela ressort du chapitre Garanties figurant en page 2 du contrat. En effet ce coût pouvait être connu de ses services depuis le 18 novembre 2010 date de l’accord de cautionnement donné par le Crédit Logement (pièce 2 de l’appelante). Il importe peu que cette somme soit ou non restituable à l’emprunteur en fin d’amortissement dès lors que la caution constituait une condition d’octroi du prêt. En revanche, il ne peut être soutenu que le coût de l’assurance collective ADI souscrite par la banque devait être également pris en compte dans le calcul du TEG. Aucune stipulation du contrat ne confère en effet un caractère obligatoire à cette assurance, et il est au contraire mentionné en page 2 : « coût de l’assurance décès invalidité facultative: 32630,40 euros ». Il ressort par ailleurs des stipulations insérées en pages 6 et 7 du contrat qu’au lieu de l’assurance collective souscrite par la banque, l’emprunteur peut (et non doit) souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance au moins équivalente en termes de garanties à celle proposée par le prêteur. Le seul fait que X… et I… C… se soient assurés chacun à concurrence de 50 % du capital prêté ne saurait constituer la preuve suffisante que le prêteur a conditionné l’octroi du prêt immobilier à la SCI à la souscription d’une assurance ADI par les associés de la personne morale, ou à tout le moins par certains d’entre eux. En prenant en considération les frais de dossier (550 euros) et le coût de la caution Crédit Logement, le taux effectif global du prêt ressort donc en réalité à 3,8112% ainsi que cela résulte du calcul clair et détaillé présenté en pièce 3 par la SCI, qui n’est pas utilement critiqué par la banque. Il en résulte donc un écart limité de 0,0355% avec le taux effectif global mentionné dans le contrat de prêt (3,7757%). Cette erreur dans le calcul du taux étant inférieure à la décimale (0,1%) mentionnée à l’article R.313-1 du code de la consommation, il n’y a lieu ni à annulation de la clause du taux d’intérêt conventionnelle ni à déchéance du droit aux intérêts, même partielle. Il convient dès lors d’infirmer le jugement et statuant à nouveau de débouter la SCI de l’ensemble de ses demandes » ;

ALORS, premièrement, QUE les juges du fond ont estimé que la SCI Betbe a suffisamment démontré que le Crédit agricole avait calculé et appliqué un taux d’intérêts calculé sur la base de « l’année lombarde » de 360 jours ; qu’en refusant néanmoins de substituer le taux d’intérêts légal au taux d’intérêts conventionnel, comme le demandait l’exposante, au prétexte que l’erreur affectant le taux effectif global était inférieur à la décimale de l’ancien article R. 313-1 du code de la consommation, la cour d’appel a violé l’article 1907 du code civil, ensemble les articles L. 313-1 et L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation en leur rédaction issue de l’ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006 et l’article R. 313-1 du même code en sa rédaction issue du décret n° 2002-327 du 10 juin 2002 ;

ALORS, deuxièmement, QUE s’agissant de l’assurance contre les risques de décès et d’invalidité souscrite par les époux C…, l’arrêt attaqué a retenu que, selon les stipulations du contrat, au lieu de l’assurance collective souscrite par le Crédit agricole l’emprunteur pouvait souscrire auprès de l’assureur de son choix une assurance au moins équivalente en termes de garanties à celle proposée par la banque ; qu’il en résulte que l’assurance contre les risques de décès et d’invalidité était obligatoire, les époux C… n’ayant d’autre choix que d’adhérer à l’assurance de groupe souscrite par le Crédit agricole ou de souscrire une assurance équivalente ; qu’en qualifiant cette assurance de facultative pour en exclure le coût du calcul du taux effectif global, la cour d’appel a violé l’article L. 313-1 du code de la consommation en sa rédaction issue de l’ordonnance no 2006-346 du 23 mars 2006. 


ECLI:FR:CCASS:2020:C100159

Analyse

Décision attaquée : Cour d’appel de Bordeaux , du 6 septembre 2018

Source