Trêve hivernale : expulsions suspendues jusqu’au 31 mars 2023
Pendant la période de trêve hivernale, l’expulsion forcée d’un locataire de son logement est impossible. Cela ne signifie pas pour autant que les impayés ne peuvent pas être combattus pendant ce laps de temps.

- Quand commence la trêve hivernale 2022/2023 ?
- Qui bénéficie de la trêve hivernale ?
- Comment expulser un locataire de son appartement pendant la période hivernale ?
- Que peut faire un propriétaire durant la trêve hivernale ?
- Quand peut-on mettre son locataire dehors ?
- Est-ce que mon propriétaire peut me mettre dehors en hiver ?
La période dite de la trêve hivernale est une période durant laquelle on ne peut pas expulser un locataire. Historiquement, on doit cette légalisation de la protection des locataires à l’Abbé Pierre en suite de la vague de froid de l’hiver 56 ayant frappé la France. Aujourd’hui c’est une disposition pérenne étendue aussi aux coupures d’énergie(gaz et électricité) en passant par l’instauration d’une trêve cyclonique.
Quand commence la trêve hivernale 2022/2023 ?
Réformée par la loi Alur, la période durant laquelle les locataires sont à l’abri des expulsions a été prolongée de quinze jours (article L 412-6 du Code des procédures civiles d’exécution). La trêve hivernale dure cinq mois ; elle débute chaque année le 1er novembre et prend fin le 31 mars suivant (au lieu du 15 mars avant) et ce quelle que soit la ville dans laquelle se trouve le logement loué. Pour la saison hivernale 2022, les dates de la trêve hivernale vont du mardi 1er novembre 2022 au vendredi 31 mars 2023.
Il existe des situations d’urgence qui permettent de passer outre la loi à savoir : les locataires se rendant coupables de cas de violences conjugales ou aux locataires disposant déjà de solution de relogement ou ceux qui se sont rendus coupables de voie de fait (squat).
Qui bénéficie de la trêve hivernale ?
La trêve hivernale bénéficie à tout locataire frappé d’un jugement d’expulsion et impose un sursis à la procédure.
Et si un propriétaire passait outre la trêve hivernale par la force ou en changeant les serrures ?
Un propriétaire qui passe outre la trêve hivernale et forcerait un locataire à quitter les lieux qu’il habite (manu militari) s’expose à de lourdes sanctions. Il est passible de trois ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende (article 226-4-2 du Code pénal). De même, il arrive que des propriétaires aient envie de changer les serrures pour inciter leur locataire à intégrer un nouveau logement. Attention ! Le locataire sera en droit de déposer plainte pour violation de domicile. Le propriétaire s’expose alors à une peine d’un an d’emprisonnement et à une amende de 15 000 € selon l’article 226-4 du Code pénal.
Comment expulser un locataire de son appartement pendant la période hivernale ?
L’expulsion pendant la période hivernale est exceptionnelle et limitée à des cas extrêmes ou justes.
En France, la trêve ne s’applique pas aux squatters
Les squatteurs ne sont plus protégés. La loi Elan a supprimé le bénéfice de la trêve hivernale pour les squatteurs. Cela signifie qu’ils peuvent être expulsés à tout moment, y compris du 1er novembre au 31 mars. Les squatters doivent quitter les lieux immédiatement. Est qualifié de squatter celui qui entre par effraction (après avoir forcé une serrure, cassé une fenêtre…) ou par tout autre moyen sans l’autorisation de son propriétaire.
Contrairement à une idée reçue, un locataire qui se maintient dans le logement après la fin du bail et sans l’accord du propriétaire n’est pas un squatteur.
La trêve hivernale suspendue pour les locataires ayant trouvé un nouveau logement
Les personnes dont l’expulsion est assortie d’un relogement correspondant aux besoins familiaux du locataire (le nombre de pièces doit correspondre au nombre d’occupants) sortent de la protection de la trêve hivernale.
La trêve hivernale suspendue pour violences conjugales
L’ époux, partenaire de Pacs ou concubin violent qui a déjà fait l’objet d’une ordonnance d’expulsion du domicilefamilial par le JAM (juge aux affaires familiales) peut être expulsé à tout moment y compris durant la période de protection allant du 1er novembre au 30 mars.
Que peut faire un propriétaire durant la trêve hivernale ?
En tant que propriétaire, vous pouvez quasiment tout faire pendant l’hiver si vous vous trouvez confronté à des locataires en état d’impayés de loyer. Cela signifie que, contrairement à une idée reçue, vous ne devez pas baisser les bras et commencer les démarches si votre locataire commence à ne pas payer en août ou en septembre par exemple. Il n’est pas trop tard, bien au contraire. C’est précisément le bon moment pour entamer la procédure ou la poursuivre si vous l’aviez déjà amorcée, et ce même en pleine trêve hivernale (saisine de l’huissier de justice, saisine du juge du fond du tribunal judiciaire ou demander le concours de la force publique). Car, pour expulser, il faut au bailleur un jugement d’expulsion.
Les actes de procédure à engager pendant la trêve hivernale
Selon le stade dans lequel vous vous trouvez, vous pouvez tout faire sauf expulser le locataire.
Lorsque votre locataire ne paie plus son loyer, vous devez le relancer, d’abord téléphoniquement ou par mail, puis lui adresser une mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception. Si la situation perdure au bout du deuxième mois d’impayés (un mois plus un jour), vous devez lui faire délivrer par huissier un commandement de payer visant la clause résolutoire. Le locataire aura alors deux mois pour payer tant en location vide qu’en location meublée. Nos contrats PAP tant en location vide que meublée intègre la clause résolutoire.
Si, au terme de ce délai, le locataire n’a pas régularisé sa situation, vous devez saisir le juge du contentieux et de la protection (JCP) auprès du tribunal judiciaire pour obtenir un jugement. Ce jugement vise à condamner le locataire à payer les sommes dues, mais surtout à résilier le bail et obtenir l’expulsion. L’expulsion n’est pas systématique, le juge tranche au cas par cas et peut décider seulement de condamner le locataire au remboursement des sommes dues. Le jugement est ensuite notifié par huissier au locataire qui dispose d’un mois maximum pour faire appel.
Dès la saisine du tribunal par le bailleur, donc dès le départ, la préfecture est prévenue par l’huissier et elle diligente une enquête sociale, financière, familiale pour cerner la situation du locataire en difficulté et tenter de l’aider. Différents intervenants se mobilisent à ce stade : une assistante sociale, la Caf, la mairie, les organismes HLM, le Fonds de solidarité logement, la commission Dalo. Tous vont tenter de trouver des aides financières et une solution de relogement. Enfin, l’enquête doit permettre au juge de prendre une décision éclairée, car, à ce stade, il peut encore accorder des délais de paiement ou des délais d’expulsion.
Passé ce délai, si le jugement a prononcé la rupture du bail et l’expulsion, le locataire reçoit un commandement d’avoir à quitter les lieux par huissier. Il a deux mois pour obtempérer. Et ce n’est qu’ensuite que l’expulsion pourra avoir lieu.
Pendant que court ce délai de deux mois, il est possible pour le locataire de saisir le juge d’exécution dans le but d’obtenir un délai de grâce pour quitter le logement. La durée des délais ne peut être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement (article L 412-4 du Code des procédures civiles d’exécution).
C’est donc toute une procédure à mener avec un huissier et souvent un avocat qui va durer au minimum entre six mois et un an. C’est la raison pour laquelle il ne faut pas attendre, mais au contraire engager la procédure rapidement, précisément pendant la trêve hivernale.
Quand peut-on mettre son locataire dehors ?
il faut attendre la fin de la trêve hivernale pour engager l’expulsion proprement dite.
Les étapes de l’expulsion
Muni de votre jugement d’expulsion, il faut penser à demander le concours de la force publique En termes simplifiés, on demande l’aide des forces de police pour le jour J. Pour se prononcer, la préfecture sollicite un rapport du commissariat de police et un rapport de l’assistante sociale. Ensuite, la préfecture accorde ou refuse le concours de la force publique au cas par cas, dossier par dossier.
La préfecture prévient ensuite tous les intervenants : le locataire, le bailleur, l’huissier, la police, la mairie et l’assistante sociale et serrurier. A ce stade, des solutions peuvent encore être trouvées pour éviter le traumatisme de l’expulsion. Enfin, l’huissier et la police se mettent d’accord sur un jour pour procéder à l’expulsion proprement dite. Le commissaire de justice peut annoncer préalablement sa visite au locataire, mais il n’y est pas obligé. Les expulsions ne peuvent avoir lieu que les jours ouvrables : du lundi au samedi entre 6 h et 21 h.
Expulsion locative : où s’informer ?
Un numéro de téléphone gratuit est mis en place par l’Anil (Agence nationale pour l’information sur le logement) pour aider les particuliers à mieux prévenir les risques d’expulsion liés aux situations d’impayés. Les propriétaires et les locataires confrontés à des situations d’impayés de loyers peuvent obtenir des conseils utiles en appelant le numéro SOS impayés de loyers au 0805 160 075. Par ailleurs, les particuliers peuvent aussi contacter les antennes départementales de l’Anil : les agences départementales d’information sur le logement, les Adil, qui les renseignent sur leur situation et les solutions possibles (aides existantes…).
Est-ce que mon propriétaire peut me mettre dehors en hiver ?
Rappelons que Non ! la loi française encadre strictement les période d’ expulsions. Il n’est pas possible qu’un propriétaire vous mette dehors de votre résidence principale (sauf exception: squat, raisons de sécurité liées aux violences conjugales ou relogement assuré). La trêve oblige un sursis de la procédure et votre propriétaire se doit d’ attendre le 31 mars de l’année c’est à dire la fin de la trêve hivernale pour reprendre les démarches d’expulsion et obtenir la résiliation de votre bail.
Et si je ne paie pas mon loyer durant la trêve hivernale: peut -il me poursuivre devant le juge ?
Oui ! le propriétaire pourra toujours vous poursuivre même en plein hiver devant le juge du fond du tribunal judiciaire en cas de problèmes d’impayés de loyer pour obtenir le règlement et actionner toutes les garanties (caution solidaire, garantie Visale).
En conclusion, le principe de la trêve hivernale ne concerne pas le paiement des loyers, mieux vaut le savoir.